Grèce
Casque Modèle 36
Fiche
- Dénomination : modèle 36.
- Destiné à une utilisation générale, puis employé par la police et la gendarmerie.
- Coiffe en cuir montée sur une armature métallique.
- Jugulaire en cuir avec deux boucles coulissantes.
- Fabriqué à partir des années 1936.
- Distribué à partir des années 1937.
- Pays d'origine : Grèce.
- Période d'utilisation : de 1937 aux années 1970.
- Matériaux : acier au nickel.
- Poids : 950 g (taille 55).
- Taille : 3 (55, 57 et 59).
- Couleur : vert olive.
Casque en taille 55.
Casque en taille 57, repeint en vert foncé.
Historique
La Grèce adopta le casque Adrian modèle 1915 français au cours de la première guerre mondiale lorsque le pays entra en guerre contre la Triple Alliance le 12 juin 1917. Le débarquement franco-britannique à Salonique en octobre 1915 contraint la Grèce à sortir de son isolement en dépit des réticences du roi Constantin 1er, proche de l'Allemagne et beau-frère de l'empereur Guillaume II. Le Premier ministre et chef du gouvernement Elefthérios Kyriáko Venizélos, en total désaccord avec le roi et très favorable aux alliés, forma un gouvernement provisoire le 13 octobre 1916 et rassembla une armée. Celle-ci, déployée dès 1916 en Macédoine, fut équipée à partir des stocks entreposés dans le camp retranché de Salonique. Ce furent donc des casques anglais Mark I et essentiellement de casques Adrian modèle 15 français (arborant la grenade française estampée du sigle RF !) qui équipèrent l'armée grecque. L'entrée de l'armée française dans Athènes au début de l'année 1917 provoqua l'abdication du roi en juin, et c'est son second fils qui lui succéda sous le nom d'Alexandre 1er, accompagné de Venizélos comme Premier ministre.
En 1918, dans le but d'uniformiser les coiffures en usage dans l'armée grecque, le casque Adrian modèle 15 fut officiellement choisi et désigné comme casque modèle 18, selon son année d'adoption. Peint de couleur vert kaki, le casque modèle 18 arborait l'attribut grec formé d'une croix hellénique contenue dans un écu, surmonté d'une couronne, symbole de la royauté.
Le 14 décembre 1936, l'armée grecque commanda 250 000 casques à l'Industrie d'émail et de métallurgie de Kéa, pour un prix final de 290 drachmes l'unité. L'intégralité de la somme serait payée en deux tranches sans intérêt : la première de 42 500 000 drachmes au cours de l'exercice 1937-38 et la seconde de 30 millions de drachmes au cours de l'exercice 1938-39. |
Casque Adrian modèle 15 de fabrication française, nommé modèle 18. |
Étapes de fabrication, de l'emboutissage à la mise en peinture puis au conditionnement.
Le casque modèle 36 est représentatif de la guerre italo-grecque opposant le Royaume d'Italie, sous gouvernement fasciste de Benito Mussolini, au Royaume de Grèce, sous gouvernement autoritaire de Ioánnis Metaxás, du 28 octobre 1940 au 6 avril 1941. Ce conflit marque le début de la campagne des Balkans lors de la seconde guerre mondiale. Le gouvernement profasciste grec rejeta alors l'ultimatum du 28 octobre 1940 par lequel l'Italie demandait le libre passage pour ses troupes. Dès lors, la Grèce se rangeait aux côtés du Royaume-Uni, au moment où Hitler occupait la plus grande partie de l'Europe.
Pour le peuple grec, la résistance contre l'agression de l'Italie fasciste prit un caractère à la fois national et antifasciste, permettant à l'armée grecque de faire face à l'agression et même de lancer une contre-offensive, amenant les armées grecques, fin 1940, à soixante kilomètres au-delà de la frontière gréco-albanaise. Pendant six mois, seize divisions grecques insuffisamment armées immobilisèrent en Albanie vingt-sept divisions italiennes disposant d'un équipement bien supérieur au leur, jusqu'à l'intervention allemande, le 6 avril 1941. À partir de celle-ci, il est désormais question de la campagne de Grèce.
Le roi et son gouvernement quittèrent le pays alors que le commandement de l'armée, composé d'officiers fascistes, capitulait le 24 avril 1941. Un certain nombre d'officiers et de soldats patriotes, ainsi que la flotte de guerre, réussirent à quitter l'Hellade, à poursuivre la lutte et à participer aux opérations alliées en Afrique, notamment lors de la seconde bataille d'El Alamein, puis à la campagne d'Italie.
Les succès militaires grecs en Albanie ont constitué la première victoire des Alliés contre l'Axe, encouragé d'autres peuples hésitants, détruit le prestige de Mussolini et influencé l'attitude américaine. La résistance en Crête a immobilisé les forces d'élite allemandes et attisé la résistance des peuples albanais, yougoslaves et grecs.
Durant la guerre italo-grecque, l'usine fonctionna 24 heures sur 24 avec trois équipes de 400 ouvriers, travaillant par tranches de huit heures. Avec une production quotidienne de 300 à 400 pièces par presse, et une fabrication effectuée manuellement, la commande de 250 000 exemplaires pour l'armée grecque fut honorée et même dépassée. La production stoppa en avril 1941 avec l'invasion allemande et la capitulation du pays.
Le casque grec modèle 36 sera employé au sein des différents mouvements de résistance durant la libération du pays en 1944 et la guerre civile qui s'ensuivit jusqu'en 1949. Il sera remplacé au sein de l'armée par le casque Mark II d'origine britannique mais continuera à être employé par les forces de police et de Gendarmerie jusque dans les années 1970.
Constitution
La coque :
Le casque grec modèle 36 est fabriqué en trois tailles :
- 55, avec une largeur extérieure maximale de 22,5 cm pour un tour de tête de 55-56 cm.
- 57, avec une largeur extérieure maximale de 23,5 cm et un tour de tête de 57-58 cm.
- 59, avec une largeur extérieure maximale de 24,5 cm et un tour de tête maximal de 59-60 cm.
Les bombes sont fabriquées à l'aide de trois presses de l'usine de Kéa dont chacune correspond à une taille de bombe (deux presses de 100 tonnes de pression pensant 17 tonnes chacune, et une presse de 60 tonnes de pression d'un poids de 12 tonnes).
La bombe est fabriquée par emboutissage d'un disque d'acier au nickel suédois, livré par bateau, d'un diamètre de 40 centimètres pour une épaisseur de1,1 millimètre. Le disque est huilé puis mis en forme dans une presse pour obtenir un bol hémisphérique. Le contour définitif du casque est tracé par application d'une autre bombe posée au-dessus comme guide. Il est ensuite découpé à l'aide d'une cisaille électrique à base fixe. La bordure franche du casque est adoucie par meulage et est légèrement incurvée vers l'extérieur sur toute la périphérie. |
Vue avant. |
Vue de côté. |
Vue arrière. |
Vue de dessus. |
Bordure évasée vers l'extérieur. |
Marquage taille 55. |
Taille 57. |
Exemplaire repeint en vert foncé. |
Livré initialement en couleur vert olive, la peinture appliquée lors de la fabrication, peu épaisse et non cuite au four, se révèle assez fragile à l'usage. On observe ainsi de nombreux exemplaires de casques repeints à l'extérieur, principalement en couleur vert foncé. Ce type de remise en peinture est assez courant pour des casques employés à la fin de la seconde guerre mondiale au cours des opérations de libération du territoire grec.
Exemplaire avec insigne peint. |
On peut rencontrer plus rarement des exemplaires munis d'un insigne frontal peint à la main sur le modèle de l'attribut métallique du casque modèle 18 de fabrication française. Cet insigne reprend le blason avec croix hellénique surmonté d'une couronne royale.
La coiffe :
Armature métallique. |
Ensemble coiffe/jugulaire. |
Tête de vis hémisphérique. |
Écrou hexagonal. |
Jointure cerclage. |
Cerclage. |
Point d'assemblage patte et fourreau de jugulaire. |
Doublure en drap de laine.
Assemblage à l'aide d'attaches parisiennes en laiton.
Couture d'assemblage arrière. |
Détails assemblage. |
Extrémité peinte en beige. |
Coiffe, vue d'ensemble. |
L'ensemble coiffe/jugulaire du casque modèle 36 n'est pas fabriqué par l'usine de l'île de Kéa, mais sur le continent et livré par bateau depuis Le Pirée. Il est monté sur une armature métallique fabriquée en acier doux, constituée d'un cerclage fabriqué à partir d'une bande d'acier large de 20 millimètres et dont les extrémités sont jointes à l'arrière par deux rivets mécaniques. Le cerclage est percé de 12 trous espacés de 50 millimètres pour la fixation de la coiffe en cuir au moyen d'attaches parisiennes en laiton. Le cerclage est positionné dans la bombe à l'aide de deux arceaux dont la partie centrale comporte le fourreau dans lequel est installée la jugulaire. Ces arceaux, dont les extrémités forment une patte de dimension 45 x 15-12 millimètres, sont retenus au cerclage à l'aide de trois rivets mécaniques. L'armature métallique est peinte de couleur vert olive, d'une teinte très proche de celle employé pour la mise en couleur de la bombe.
La coiffe, fabriquée en cuir d'agneau fin, est constituée d'une bande de cuir périphérique large de 60 millimètres dont la longueur dépend de la taille de la coiffe. Sept languettes sont cousues sur ce bandeau et jointes à l'aide d'un lacet en cuir fin, dont la tension assure le réglage en profondeur de la coiffe. Six pattes sur sept sont perforées de 8 trous répartis en quinconce pour assurer l'aération du crâne (on observe cependant des pattes non perforées en raison d'un incident de fabrication, celles-ci étant sans doute les dernières de la pile lors de la perforation). La septième patte non perforée comporte un marquage estampé sur la surface du cuir.
L'extrémité des pattes de coiffe possède un orifice renforcé d'un œillet métallique pour le passage du lacet. Cette extrémité est peinte de couleur beige proche de celle du cuir pour couvrir l'œillet métallique non peint lors de son application.
La coiffe est doublée d'un bandeau en drap de laine ondulé cousu sur toute la périphérie de la coiffe au moyen d'une couture en zigzag. La coiffe est jointe à l'arrière par une couture similaire.
La coiffe est fixée à la main dans la bombe par les ouvrières de l'usine de Kéa à l'aide de quatre vis à tête hémisphérique et des écrous hexagonaux plats. La vis et l'écrou sont matés ensemble pour éviter le desserrage. Ces éléments reçoivent une petite touche de peinture appliquée au pinceau après montage. Lors du conflit italo-grec de 1940-41, alors que la production du casque grec est au plus haut, les coiffes étaient montées directement dans les logements des ouvrières.
Lorsque l'assemblage des casques est terminé, les unités sont enveloppées dans du papier sulfurisé puis empilées par cinq et emballées dans des caisses en bois d'un mètre de côté. Ces caisses sont scellées puis livrées à l'armée grecque.
Marquage, taille 57 refrappée en 55. |
Marquage, taille 57. |
Le marquage estampé sur la patte de coiffe non perforée présente une inscription en alphabet grec (ΕΛΛΗΝΙΚΟΣ ΣΤΡΑΤΟΣ, ce qui signifie ARMÉE GRECQUE) entourant la croix hellénique, le tout sommé d'une couronne royale. Cette marque surmonte la taille de la coiffe estampée dans un ovale. On observe des cas de marquages dont la taille est corrigée par refrappe du dernier chiffre (fréquemment 57 refrappé en 55).
La jugulaire :
Jugulaire avec deux boucles coulissantes, vue à plat (envers/revers).
Anneau de maintien. |
Boucle de réglage. |
Rivet de maintien du fourreau. |
Fourreau de jugulaire. |
Fourreau de jugulaire. |
Détails maintien. |
Tout comme la coiffe, la jugulaire fait partie de l'aménagement intérieur fabriqué à l'extérieur de l'usine. Les fourreaux de jugulaire font partie intégrante des arceaux retenant la coiffe dans la bombe. Ils sont formés par une patte en acier doux de dimension d'environ 50 x 20 millimètres pliée en deux en formant une gorge pour permettre le pivotement des boucles retenant la jugulaire. |
Jugulaire, vue d'ensemble. |
Les reconditionnements des années 1950
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Avec la libération de la capitale Athènes le 11 octobre 1944, un Gouvernement d'union nationale s'installa et très vite des divergences naquirent entre les différents groupuscules issus de la résistance. En raison de cette instabilité politique, une guerre civile éclata avant même la fin de la seconde guerre mondiale entre les troupes régulières et les partisans communistes regroupés dans le nord du pays. Ces combats se poursuivirent jusqu'en 1949. |
Il est ensuite principalement reversé aux forces de police et de gendarmerie et subit le même reconditionnement que les casques Mark II de l'armée. Il sera utilisé avec un nouvel aménagement intérieur jusque dans les années 1970.
La coque :
Vue avant. |
Vue de côté. |
Vue arrière. |
Vue de dessus. |
Après la seconde guerre mondiale, une grande partie des casques modèle 36 subit un reconditionnement par suppression de l'aménagement intérieur maintenu par quatre vis et écrous. Les quatre orifices sont laissés libres.
Les bombes sont percées au point sommital pour l'installation de la nouvelle coiffe et sur les côtés pour la mise en place des nouveaux fourreaux de jugulaire, maintenus par rivets mécaniques.
Les bombes sont ensuite repeintes en couleur vert olive clair.
La coiffe :
Intérieur bombe. |
Coiffe sur armature métallique. |
Confection coiffe. |
Marquage taille estampé sur arceau. |
Aménagement intérieur, vue d'ensemble. |
La nouvelle coiffe est calquée sur celle du casque Mark II britannique. La coiffe grecque est fabriquée à partir d'une bande de toile cirée brune dont la surface est brillante. La base de cette coiffe est scindée en 5 pattes en forme de triangle, donc la pointe est repliée sur elle-même par une couture double pour le passage du lacet de réglage en profondeur.
La coiffe est ensuite cousue sur une bande de mousse néoprène prise dans une gaine en tissu sur un cerclage en carton compressé de couleur rouge brique. La couture parcourt la totalité de la circonférence du cerclage. La taille de la coiffe est indiquée par un tampon à l'encre apposé au revers de celle-ci en métrique anglaise.
La coiffe est complétée de deux arceaux pour le maintien à l'intérieur de la bombe. Ils sont fabriqués à partir de bandes d'aluminium et sont maintenus au cerclage par deux rivets à chacune de leurs extrémités. Ces rivets ont la particularité d'être recouvert d'une couche de plastique brun ; il en est de même pour le rivet creux du passage de la vis de fixation au croisement des deux arceaux. À noter que la taille des arceaux est estampée à froid sur l'un d'eux.
Afin d'assurer le contact entre la coiffe et l'intérieur de la bombe, huit amortisseurs en caoutchouc sont répartis par groupes de quatre : un amortisseur est maintenu par deux rivets entre chaque arceau, et un amortisseur est riveté à la base de chaque arceau.
Enfin, la coiffe est montée à l'intérieur de la bombe par une vis et un écrou de type « Simmonds » (avec une rondelle de caoutchouc pour éviter le desserrage). L'écrou est protégé par un tampon cruciforme en mousse néoprène retenu par ce dernier.
La jugulaire est maintenue aux fourreaux de jugulaire copiés sur le modèle Mark III britanniques. La nouvelle jugulaire est fabriquée à partir d'une bande de cuir épaisse de 2 millimètres et d'une longueur d'environ 55 centimètres pour 12 millimètres de large. Cette jugulaire possède à une de ses extrémités une boucle en laiton à double passant qui a la particularité d'être légèrement profilée.
La jugulaire est maintenue par deux anneaux métalliques, l'un retenu à l'extrémité opposée, l'autre coulissant dans la jugulaire avant passage dans la boucle de réglage.
La jugulaire est ensuite clipsée dans les deux fourreaux rivetés de chaque côté du casque.